Née de la plume de Victor Mora et mise en image par Antonio Parras, deux espagnols qui n'en sont plus à leur coup d'essai depuis longtemps, la série "Les Inoxydables" paraît pour la première fois dans "Charlie Mensuel" en 1982. Cinq albums édités sous le label Dargaud voient le jour entre 1984 et 1989.
L'action a pour cadre les années vingt. Les auteurs, tout en mêlant habilement aventure et humour, racontent les péripéties rencontrées par Mark et Golo, deux personnages hors du commun, que le hasard a réunis pour le meilleur et pour le pire, mais surtout pour le pire.
La logique aurait voulu que ces deux-là ne se rencontrent jamais tant leurs différences sont flagrantes.
En effet, Mark Devereaux est un jeune "dandy" fauché issu de la haute société bostonienne que le métier de journaliste a conduit à Chicago. Marqué par son passage dans l'armée durant la première guerre mondiale, il n'a actuellement qu'un but : la recherche du fric et des honneurs. En nuançant quelque peu, on pourrait presque le définir comme la tête pensante de l'équipe.
Golo Grant est tout le contraire. C'est un bouseux au physique tout à fait particulier, originaire d'une petite ferme de l'Oklahoma. Pas loin d'être considéré par moment comme un simple d'esprit, Golo représente la force brutale et non réfléchie.
Couple insolite et complètement détonant, "Les Inoxydables" comme ils se définissent eux-même, semblent être au cours de leurs pérégrinations la proie de tout ce que le monde compte de moins scrupuleux et de plus malhonnête. Il faut dire qu'ils ont le chic pour chercher les ennuis et se fourrer dans des situations inextricables. A force de vouloir à tout prix jouer dans la cour des grands lorsqu'on n'a pas pas la carrure, on ne peut évidemment que se casser les dents.
Vous l'aurez compris, "Les Inoxydables" sont avant tout des "losers", des naîfs au grand coeur qui succombent à la première flagornerie. Le monde se moque d'eux mais ils gardent le moral et ne se laissent pas démonter pour autant et c'est ce qui les rend si attachants.
En fait, la série est construite sur le mode aventure-humour. Ainsi les situations musclées succèdent aux situations burlesques et vice-versa. Antonio Parras, dont le trait est au départ on ne peut plus réaliste; force sur sa plume et tente d'obtenir par moment un dessin proche de la caricature. Quelques astuces graphiques émergent ainsi au hasard de la série et lui donnent un cachet unique. Les scènes d'action, par exemple, sont le plus souvent parodiées à l'extrême et certains des antagonistes en sortent en petits morceaux. Des yeux, des mains mais aussi des dentiers se baladent un peu partout. Exemple plus précis, dans "Le soutien-gorge bleu" planche 3, ce "vagabond" qu'on abat alors qu'il saute d'un train et qui arbore de ce fait en plein vol une tête de mort. Beau raccourci, non ?
"Les Inoxydables" est une série au ton tout à fait spécial qui peut décontenancer au premier abord mais qui finalement révèle au fil des pages des surprises étonnantes. Divertissement assuré.